Les envahisseurs du nord-est qui minèrent la puissance akkadienne dès le règne de Sharkalisharri eurent raison de la dynastie qui s’arrête avec Shuturul vers 2150, après une époque trouble, caractérisée dans les textes cunéiformes par une formule pleine de perplexité : « Qui était roi, qui n’était pas roi ? »1.
Les Guti soumirent le pays et le gardèrent sous leur joug durant quelque 125 ans, jusqu’à ce que le roi d’Uruk, Utuḫegal ait vaincu leur roi Tiriqan vers 2115, laissant peu après la place au fondateur de la IIIe dynastie d’Ur, Ur-Nammu2. Aucune statue de Guti dûment inscrite n’est connue, permettant d’identifier l’un des vingt rois qui se succédèrent. Il est d’ailleurs peu probable que ces populations nomades aient eu une tradition artistique développée. Pendant ce temps et durant le demi-siècle qui sépare la fin de l’empire d’Akkad du début de la IIIe dynastie d’Ur, le pays de Sumer réussit à relever la tête et Lagash a connu là son âge d’or, depuis UrBau jusqu’à Nammahni. La succession des ensi n’est pas claire et les synchronismes sont rares. On sait seulement que Nammahni fut vaincu et tué par Ur-Nammu et il paraît vraisemblable, comme l’a montré Edmond Sollberger, que les deux autres gendres d’Ur-Bau, Gudéa et Urgar, aient régné avant Nammahni3.
Le tournant pris sous la dynastie d’Akkad par l’évolution du rôle de la statuaire ne fit que s’accentuer et l’on chercherait en vain maintenant une sculpture populaire sur pierre. C’est alors que va se développer l’usage des figurines de terre cuite moulées, plus à la portée de la population. Les statues, souvent grandeur nature, sont un luxe que seuls peuvent s’offrir les souverains, fiers d’importer de beaux blocs de pierre. L’engouement pour la diorite, « la pierre de Magan », connut sans doute son apogée sous Gudéa, mais les rois d’Ur l’apprécièrent également et l’usage n’en faiblit pas en Mésopotamie jusqu’à la fin de la 1ère dynastie de Babylone.
Alors que de grandes statues divines se dérobent toujours — et le cas de Lagash avec ses nombreux temples est à cet égard une vraie énigme4 — l’on ne connaît plus guère que des statues royales, dans une attitude hiératique et statique, les pieds nus réunis, les mains presque toujours jointes pour la prière, le visage solennel, sans l’ombre d’un sourire, même chez les femmes. Toute fantaisie est bannie au profit d’une grandeur voulue où se reflète à la fois l’humilité devant les dieux et la majesté devant les sujets.
Personnages
Mésopotamie
A. L’âge d’or de Lagash (2150-2111)
1. Divinités
Les seules statuettes divines imputables avec certitude à cette époque, grâce à leur inscription, sont les clous de fondation en cuivre trouvés à Tello et dédiés à plusieurs divinités par Ur-Bau5 et par Gudéa6, princes (ensi) de Lagash. Le personnage est àdemi agenouillé, la jambe droite repliée sous lui avec les orteils retournés, la jambe gauche fléchie. Le corps élancé est vêtu d’une courte jupe et il étend les bras devant lui pour saisir des deux mains la partie supérieure d’un pieu inscrit qu’il maintient verticalement contre ses jambes. Son visage est en partie couvert par une barbe en pointe, ondulée, et sur ses cheveux longs roulés en chignon sur la nuque il porte une tiare à quatre rangs de cornes superposées convergeant vers une boule qui la surmonte7.
Malgré la corrosion qui a attaqué le métal de plusieurs exemplaires, ces figurines moulées témoignent d’une technique artistique poussée, basée sur la connaissance du mouvement anatomique et de la morphologie du corps. Le rôle de protection est à nouveau assuré par la pointe, ici indépendante du corps, alors qu’elle en est solidaire chez les porteurs de couffin et les taureaux couchés (ci-dessous, p. 205, 221), comme à l’époque présargonique. Ces dieux protecteurs de l’intégrité des temples portent des dédicaces à Ningirsu, mais aussi à ses fils, les dieux lkalim et Shulshaga8, alors que la tiare est invariablement à quatre rangs de cornes, nombre maximum attribué aux divinités de haut rang. Ce type, attesté seulement jusqu’à présent chez Ur-Bau et chez Gudéa, a été abandonné ensuite au profit du porteur de couffin qui doit être le souverain lui-même9.
L’identification de la statue masculine acéphale, inscrite au nom d’Alla et provenant de fouilles clandestines à Tello10, est problématique. Elle a été tour à tour identifiée avec l’ensi de Lagash, contemporain de Shulgi d’Ur11, puis avec le dieu, en raison du déterminatif divin qui précède son nom et de son vêtement de kaunakès12. Nous avons adopté cette dernière identification dans Les statues de culte13. Il ne semble pas en effet qu’un ensi de Lagash se soit fait diviniser de son vivant, mais il faut noter que Gudéa a dû l’être après sa mort, puisque des textes d’offrandes présentent le déterminatif divin devant son nom14. D’autre part les rois d’Ur pouvaient en certaines circonstances solennelles porter la robe à volants issue du kaunakès. On le voit par exemple sur une empreinte de Shulgi, divinisé il est vrai de son vivant : le prédécesseur d’Alla, Ur-Lama, suivi d’une déesse Lama qui intercède, se présente devant le roi Shulgi assis, coiffé du bonnet à serre-tête et vêtu de la robe à volants15. Cependant si le kaunakès est encore en certains cas porté par des humains, il ne faut pas oublier que, d’après l’inscription, notre personnage est non seulement roi de l’Ékisal, mais sukkal du dieu Ningizzida et le bâton qu’il tient de la main gauche est l’insigne de sa dignité, tel qu’on le voit sur un fragment de stèle de Gudéa à Berlin16. Si le vêtement à volants est stylisé différemment, la façon dont le bâton est serré de la main gauche, la main droite revenant sur le poignet, est à peu près semblable, à la différence près que sur la stèle le poignet droit passe derrière le bâton. Là il n’y a pas d’équivoque possible, les dieux sont coiffés de la tiare à quatre rangs de cornes et Ningizzida, reconnaissable aux dragons mushrushu qui sortent de ses épaules, ainsi que le dieu au bâton qui le précède, portent une longue barbe rectangulaire tombant sur la poitrine. C’est justement l’absence de barbe sur le haut du corps de la statue qui continue à faire douter André Parrot qu’il s’agisse d’un dieu17. Pourtant un cylindre de Tello18 montre un « messager » armé d’un long bâton amenant de l’autre main un homme rasé, long vêtu, à un dieu assis, nu-tête, mais dont les épaules laissent échapper de part et d’autre un serpent ondulé. Le messager imberbe porte la toge unie libérant l’épaule droite, le décolleté orné de deux galons ou plis à la mode de la IIIe dynastie d’Ur. Sur sa tête est enfoncé un bonnet-cloche avec un étroit liseré et son visage est imberbe. L’inscription indique qu’un certain Nikala a voué ce cylindre au dieu Ningizzida, « son roi », pour la vie de Shulgi. Nul doute qu’ici encore, l’intermédiaire au bâton est le dieu Alla, sans barbe, comme on peut également le voir sur un autre fragment de stèle de Gudéa où l’ensi est présenté par un homme à la tête rase, vêtu de la robe à volants19.
2. Souverains
a) Les princes
Les princes sont bien identifiés, soit par les inscriptions, soit par leur coiffure qui devient un véritable bonnet, inspiré du serre-tête sur un tissu. Le bandeau prend de l’importance en épaisseur et en hauteur, faisant corps avec la calotte ronde. Le personnage a généralement le crâne et le visage rasés (Gudéa), mais il peut aussi porter la barbe (buste d’Ur-Ningirsu). Le principe du costume est la « toge », c’est-à-dire une pièce d’étoffe rectangulaire, dont la chaîne est effrangée sur les deux petits côtés, enroulée autour du corps, couvrant d’un pan le bras gauche jusqu’au poignet, tandis que l’autre pan est ramené sous le bras droit, l’angle supérieur rentrant en biais dans l’encolure en formant de multiples plis. Une remarque s’impose pour ce vêtement, comme pour la plupart de ceux qui sont portés et représentés en sculpture : malgré le soin et la compétence avec lesquels des spécialistes se sont penchés sur leur reconstitution, en utilisant des modèles vivants ou des mannequins20, la part de la convention reste grande, ce que reconnaissait d’ailleurs Léon Heuzey. C’est ainsi que la ligne horizontale du bas de la robe n’est pas réalisable avec une étoffe drapée21. De même, le second pan superposé sur le bras gauche, avec la frange en bas, visible sur les statues de Gudéa, s’explique difficilement, malgré les schémas de L. Heuzey22, car il aurait immobilisé à peu près complètement le bras gauche, tandis que le double enroulement du tissu aurait entravé la marche de l’homme. Il faut donc admettre que le costume était, sinon en partie cousu, du moins ajusté avec des épingles.
Les pieds des statues sont toujours nus. Les mains sont unies par la paume dans un geste qui n’a guère changé depuis l’époque akkadienne.
Le premier ensi qui se soit affirmé sur le territoire de Lagash, à la chute d’Akkad, vers 2150, est Ur-Bau qui semble avoir régné 14 ans23. Sa statue acéphale, trouvée par E. de Sarzec à Tello, inaugure la série de statues de diorite illustrées par son gendre et successeur, Gudéa24. Le premier, il relate la construction de l’Éninnu et de bien d’autres temples en 6 colonnes qui couvrent une grande partie du dos de la statue qui a pu être remontée à l’aide de plusieurs fragments. Le prince est debout, vêtu de la tunique-toge unie, sans franges, mais avec le double pan sur le bras gauche. Malgré le manque de tête, l’amorce du menton indique l’absence de cou. Les mains sont l’une dans l’autre avec les pouces croisés au-dessus et les doigts de la main gauche soutenant l’autre avec raideur et formant un seul angle au niveau des deuxièmes phalanges. Une grande partie de la tunique et les pieds manquent. Un aspect plus trapu encore a été donné à une statuette en diorite anépigraphe détournée du chantier de Tello et entrée dans la collection De Clercq, puis donnée en 1968 au Louvre25 (Pl. 123). La tête imberbe, au crâne rasé, est trop forte par rapport au corps et l’absence de cou renforce encore la disproportion. L’homme debout n’est guère plus grand que s’il était assis. Ses pieds nus s’encadrent dans une niche ménagée entre le bas de la tunique et le socle et l’on ne voit que le double alignement des orteils. L’attitude est la même que chez Ur-Bau, mais la tunique est encore simplifiée, car ne sont indiqués ni les plis de l’extrémité du tissu sous le bras droit collé au corps, ni le second pan sur le bras gauche. Le menton est volontaire, la bouche bien dessinée ; les sourcils unis se rejoignent à la naissance du nez dont le bout est cassé ; les yeux sont très grands, bien ourlés par le bourrelet des paupières ; le front est bas et les oreilles comme plaquées. Il y a une raideur peut être voulue, mais qui semble plutôt le fait d’un artiste médiocre. On ne peut plus guère parler d’art populaire à cette époque pour la statuaire et pourtant cette œuvre n’est pas digne de la série royale inaugurée par Ur-Bau. Nous hésitons donc à y voir un prince régnant.
Ur-Bau ne dut pas avoir de fils, puisque ce sont ses gendres qui lui ont succédé, Gudéa, Urgar et Nammaḫni26. Le plus connu est évidemment Gudéa qui, au long de ses 16 années de règne27, voua une vingtaine de statues à Girsu dans les différents temples. La pierre utilisée est presque toujours la diorite apportée « de la montagne de Magan » comme sous les rois d’Akkad (ci-dessus, p. 146). La matière permet un beau poli et sa dureté souligne la maîtrise de certains sculpteurs. Que le prince soit représenté debout ou assis, son aspect est le même : il est drapé dans la tuniquetoge à lisière finement striée, dont les plis sont indiqués uniquement sous le bras droit et au coude gauche28. Les pieds sont toujours nus, les orteils bien séparés et copiés avec naturel. Dans la majorité des cas, les mains sont jointes. La tête est rasée et imberbe, avec le bonnet serre-tête en fourrure soigneusement bouclée et stylisée, qui fait penser à de l’astrakan, enfoncé jusqu’aux sourcils en arêtes de poisson et qui couvre la plus grande partie des oreilles. Le menton est volontaire, les pommettes hautes et larges saillent légèrement sous la peau. Une vue superficielle de l’ensemble des statues, à quelques exceptions près, donne une impression de force et de grandeur dans l’uniformité, la copie toujours pareille d’un modèle fixe. Un examen plus attentif montre qu’il n’en est rien et que cette impression d’uniformité est surtout due à la matière.
Gudéa a régné 16 ans ; il y a donc une différence que l’on peut discerner entre la jeunesse et la maturité : le souverain jeune apparaît dans une statuette retrouvée clandestinement à Tello en 1924, en même temps que d’autres29, et entrée dans la collection Stoclet à Bruxelles30. Complète à l’exception des pieds, elle se distingue nettement de l’ensemble, d’abord par la matière, ensuite par le geste des mains qui est exactement le même que celui de la statue d’Alla (ci-dessus, p. 186), c’est-à-dire la main droite aux doigts allongés en biais sur le poignet gauche dont le poing est fermé, mais sans tenir un bâton. La statue frappe par son caractère élancé, le buste s’amincit à la taille et les hanches sont fines ; il y a une amorce de cou et le visage est juvénile. Une autre particularité est une courte frange de glands dans le bas de la tunique, bordée de trois lignes parallèles, alors que le bas des autres tuniques est uni. Ce détail est directement inspiré du costume des rois d’Akkad, il est très semblable sur la statue en calcaire que nous avons proposé d’attribuer à Rimush (ci-dessus, p. 152). On le retrouvera au début du IIe millénaire chez Idi-ilum de Mari (ci-dessous, p. 241). La même sveltesse se remarque sur une statue en diorite, dite « aux épaules étroites »31 (Pl. 124), qui est celle d’un homme jeune dont les traits sont également reconnaissables dans une petite tête au bonnet de fourrure du Louvre32, ou le haut d’une petite tête trouvée à Nippur en 189933.
Taillées par un autre ciseau apparaissent les statues debout au canon particulièrement court du musée Ny-Carlsberg de Copenhague34 et « au vase jaillissant » du Louvre35 (Pl. 125). Le visage de la seconde semble plus juvénile, mais on pourrait se tromper de l’un à l’autre de ces ex-voto à la déesse Geshtinanna, si le vase aux eaux jaillissantes n’était pas là pour apporter sa note de singularité. Le vase globuleux à large col est toujours celui qui est adopté, le même que tenait le héros du cylindre voué par un scribe de Sharkalisharri (ci-dessus, p. 171). Chaque main prend sa place, à gauche sous la panse, à droite autour du col. Encadrant l’inscription, les quatre flots ondulés parallèles qui s’échappent de part et d’autre, suivent le vêtement, remontés de chaque côté par des poissons au corps quadrillé36. Quatre vases, sculptés sur le pourtour du socle, recueillent deux par deux l’eau jaillissante37. Les pieds, comme dans toutes les statues debout du prince, sont taillés dans une niche ménagée devant. Alors que le bonnet de la statue Stoclet avait encore un bord étroit et bas à quatre rangs de bouclettes, celui-ci, comme celui de Copenhague, est plus haut et saillant à arêtes vives, à six rangs de bouclettes, comme sur les petites statues assises en diorite, alors que la tête du Louvre en comporte sept38 (Pl. 126), de même que la tête du musée de Philadelphie39, qui a bien des chances de compléter une statue assise du musée de Bagdad40.
Cette coiffure royale a pu être rapportée par Gudéa ou l’un de ses prédécesseurs, lors d’une expédition dans les montagnes du nord-est. Une indication de provenance peut être proposée par le rapprochement avec un cylindre de la collection Henri de Genouillac à Rouen41, sur lequel un chasseur dans la montagne vise d’une flèche un animal sauvage dont la tête a disparu, déjà attaqué par derrière par deux molosses. L’homme est vêtu d’un vêtement terminé dans le bas par une large lisière ouvragée et il porte sur la tête le bonnet laineux à haut bord. Un cartouche de trois lignes interposé entre le chasseur et l’animal nomme un gouverneur (nubanda) lkrub-el, fils d’lbubu, nom caractéristique de la région du Zagros, qui nous fait regarder du côté des Guti42.
Gudéa n’étendit pas son influence seulement sur Lagash et Girsu, car trois fragments de têtes en diorite de taille humaine, dont un bonnet de fourrure, ont été trouvés à Ur43. Dans ces morceaux épars, l’on reconnaît l’œil ourlé du bourrelet des paupières et les sourcils en arêtes de poisson, la bouche aux lèvres bien dessinées, surmontée du sillon sous le nez, le menton en galoche. Les dieux de Nippur durent également être les bénéficiaires de sa piété, puisque sur ce site furent ramassés la tête à bonnet déjà mentionnée (note 33) et, un demi-siècle plus tard, le haut d’une petite tête rasée44.
La tête du Louvre montre un homme en pleine maturité, comme les petits Gudéa assis45, la statue acéphale de « l’architecte à la règle »46 (Pl. 127) ou la statue debout, acéphale, « aux larges épaules »47 (Pl. 128). Les épaules sont massives, la musculature du bras droit solidement apparente. C’est sans doute la facture des mains qui montre le mieux la différence de technique d’une statue à l’autre : le geste est le même, mais les doigts de la main gauche remontant sur la main droite sont traités avec plus ou moins de souplesse. Les plus belles sont probablement celles de « l’architecte à la règle »46, avec les phalanges gauches pliées pour épouser la forme de la main droite rappelant les mains de la statue de Manishtusu (ci-dessus, p. 151). Les trois traits sur les phalanges n’y sont pas visibles comme sur « l’architecte au plan »48 où, par contre, les dernières phalanges ne sont pas pliées et où les doigts ne sont plus séparés par endessous. La plupart des autres statues ont les doigts raides, ce que l’on voit bien sur le petit Gudéa du Louvre49 (Pl. 129).
L’uniformité apparaît au contraire dans le tabouret des Gudéa assis : les pieds évasés latéralement sont réunis par deux traverses et supportent une tablette légèrement débordante. Sur ce même siège est assis un homme aux mains jointes, vêtu d’une tunique plus courte que de coutume, bordé d’une large bande striée verticalement sous les genoux50. L’inscription dans le dos indique que Gudéa, ensi de Lagash, a donné de grandes prérogatives à Nammaḫni, grand prêtre (gala). Celui-ci doit être son beau-frère, dont on sait qu’il deviendra lui-même ensi, vaincu et tué par UrNammu. L’absence de la tête de cette statuette empêche l’identification, mais les différences du costume et la petite taille pourraient être en faveur d’une effigie de Nammahni.
La question reste ouverte de savoir si ces représentations votives installées à plusieurs exemplaires dans les temples51, sont de véritables portraits ou de simples porte-parole stéréotypés. La morphologie si particulière du visage carré de la maturité52, avec son menton en galoche et ses hautes pommettes, malgré la convention des sourcils en arêtes de poisson, caractéristiques de l’époque, ne peut qu’être copiée d’après nature. D’autres têtes masculines en diorite ou en calcaire ont leur physionomie propre, comme on peut le voir sur une tête rasée du musée de Berlin, à l’ossature plus étroite, à l’occiput proéminent, au nez droit, aux sourcils faits de trois bourrelets unis53, qui se rejoignent en V sur le nez, assez proche d’une tête du Louvre au faciès plus étroit encore54 (Fig. 59) en laquelle A. Parrot a cru reconnaître le portrait du prince héritier, Ur-Ningirsu, par comparaison avec la tête de sa statue.
59. Tête masculine. Diorite.
Quoi qu’il en soit, le nez fin, busqué de façon presque imperceptible, pointu ou arrondi du bout, diffère suivant la physionomie de chacun, avec une grande sobriété de moyens55 (Pl. 130). La maîtrise des sculpteurs est telle, à ce stade, qu’il est invraisemblable de supposer qu’ils n’ont pas cherché, au nom d’un soi-disant idéal, à rendre la ressemblance. Les exemples sont là pour montrer la finesse de perception qui n’était entravée par aucune maladresse technique.
Il est malaisé de savoir si les figurines en cuivre de porteur de couffin représentent le souverain qui a fait la fondation. Celles de Gudéa ont un aspect particulier et original56 : le personnage, comme l’ensi, est entièrement rasé ; de ses deux mains il tient en équilibre sur sa tête un récipient rond évasé, plus bas que celui que portait le roi UrNanshe sur l’un des reliefs perforés57. Le buste est nu et une étroite jupe unie jusqu’aux genoux souligne la sveltesse. La jambe gauche est légèrement en avant, héritage de l’époque présargonique. Sous l’étroite plateforme ronde qui supporte les pieds part une courte pointe qui assure la fonction protectrice de ces figurines-clous de fondation. Qu’il s’agisse de Gudéa ou d’un prêtre agissant en son nom, la constatation faite pour le Dynastique Archaïque reste valable du contraste entre le caractère massif des statues de pierre et l’élégance de la silhouette en métal.
Ur-Ningirsu, le fils et successeur de Gudéa, régna peu de temps : 5 années ont pu être repérées58. Il n’en continua pas moins les fondations de temples où il introduisit ses statues, dont trois sont arrivées sur le marché des antiquités à la suite de fouilles clandestines. La plus connue, déterrée en 1924, a pu être achetée aussitôt par le Louvre59, mais sans la tête, entrée par ailleurs dans une collection américaine, puis acquise en 1947 par le Metropolitan Museum de New York60 (Pl. 131). Par suite d’une entente entre les deux musées, la tête est désormais replacée sur le corps et la statue sera présentée alternativement pour une période de trois ans à Paris et à New York61. L’impression d’élégance du corps vêtu de la tunique-toge, analogue à celle de Gudéa, est quelque peu mitigée par l’importance de la tête presque dépourvue de cou. Le visage au nez légèrement busqué, au menton en galoche, est moins expressif que celui de Gudéa. Par contre les mains jointes sont d’une grande sensibilité et les doigts allongés de la main droite, au lieu d’être raides, sont légèrement fléchis. Le grand intérêt de la statue, outre sa dédicace à Ningizzida et l’indication de sa filiation par rapport à Gudéa, est le socle sculpté de huit porteurs de corbeilles en vannerie, un genou en terre. Les hommes sont barbus, coiffés d’un bonnet à serre-tête, vêtus d’une jupe aux genoux serrée par une grosse ceinture, le dos couvert d’une sorte de tablier rigide de portefaix. Les paniers contiennent des récipients de formes variées, dont certains renversés. Ces hommes, tous différents, sont probablement des bédouins, chefs de tribus soumises62. Nous avons signalé (ci-dessus, p. 149) que l’un d’eux portait même barbe et même coiffure qu’une tête de Bismya (Pl. 99). Un détail qui a généralement échappé à l’attention est une série de 4 stries sur le socle, qui relient le haut de la tête des deux premiers tributaires à chacun des pieds du monarque. On peut penser à une aigrette passée dans le serre-tête, mais il nous semble plus plausible d’y voir matérialisée la soumission complète des régions, symbolisée par l’enchaînement de leurs représentants.
Les deux autres figures d’Ur-Ningirsu sont des bustes entrés au musée de Berlin. Le buste en diorite63 (Pl. 132) a provoqué l’étonnement par le port d’une longue barbe en pointe à quatre rangs de bouclettes superposées, traitée comme sur le fragment de tête en diorite de Tello, généralement attribuée à l’époque d’Akkad (ci-dessus, p. 148, n. 22). Avec G. Contenau64, nous pensons que cette barbe n’est pas postiche et a bien été portée par Ur-Ningirsu, à une époque où peut-être il était malade, car un pli est marqué sous les yeux. On peut en effet penser qu’une maladie a mis fin à son court règne. L’épaisse coiffure de forme cloche n’est pas non plus habituelle. La façon dont la matière est stylisée en zigzag, rayonnant depuis le sommet de la tête avec une boucle terminale, se retrouve sur la toison du taureau androcéphale au nom de Gudéa (ci-dessous, p. 220) ; plutôt qu’un bonnet, elle doit représenter l’épaisse chevelure, car d’autres exemples de chevelure-cloche sont attestés, en particulier sur un fragment de stèle de Gudéa représentant un homme assis, chevelu et barbu65 et surtout sur un petit buste de Suse66.
Le second buste d’Ur-Ningirsu le représente en porteur de chevreau. Il est d’une si mauvaise facture qu’il a rarement été publié et toujours sans son inscription67. Le haut de la tête et le bas du corps sous la taille manquent. Si le visage est plat et peu attrayant, le mérite de cet objet est de nous montrer comment, à l’époque, était porté l’animal du sacrifice : les deux mains ouvertes l’une au-dessus de l’autre, le plaquent contre la poitrine, geste qui est illustré par deux statuettes acéphales de Tello. De l’une il ne reste que le torse, amputé du bras droit, en bel albâtre et d’un travail particulièrement soigné68 (Pl. 133). Le chevreau a, comme chez Ur-Ningirsu, la tête appuyée sur l’épaule gauche, bien détaillée avec la barbiche, les oreilles tombant et l’œil autrefois incrusté. Les pattes antérieures fléchies passent sur le bras de l’homme, tandis que l’arrière-train et les pattes postérieures sont tenus par les deux mains l’une au-dessus de l’autre, doigts étendus. La toison de l’animal, entre l’encolure et la main, est indiquée par une superposition de chevrons, alors que le reste du corps de l’animal est uni. Au dos, une inscription de cinq cases était une dédicace au dieu Ninshubur, mais le nom du personnage, probablement un ensi, a été martelé69. Fait étonnant à cette époque pour un petit modèle, un trou de mortaise dans le cou indique que la tête avait été rapportée, signe d’une réparation, à moins qu’elle n’ait été d’une autre matière. L’autre statuette, au corps presque complet, est identique, mais anépigraphe70 (Fig. 60) ; il y a tout lieu de penser qu’il s’agit là aussi d’une statue royale, l’apport de l’animal du sacrifice étant généralement réservé au souverain71.
D’aucun autre ensi de cette dynastie de Lagash, les fouilles n’ont livré de statue.
60. Tello. Porteur de chevreau.
b) Les princesses
L’anonymat qui caractérisait jusque-là la femme, fût-elle de sang royal, disparaît à Lagash et quelques reines et princesses ont ainsi perpétué leur souvenir, souvent malheureusement dans un piètre état. Le vêtement est fait d’un tissu rectangulaire, plus orné que celui des hommes, car, outre les franges, il offre des lisières ouvragées. Il couvre plus généralement les deux épaules, mais l’épaule droite peut encore être libérée, Le bandeau reste la règle, sur les cheveux noués en chignon, recouverts d’un voile, Enfin les bijoux sont désormais appréciés. Il faut remarquer qu’aucune grande statue féminine n’a été retrouvée, toutes sont de petit format.
Deux dames ont voué leur statuette pour la vie de Gudéa, sans compter celles dont les inscriptions ont disparu, Aucune n’a conservé son nom et pourtant nous savons par d’autres objets que Gudéa eut au moins deux épouses : Ninalla72 et Gemeshulpae73. Comment savoir laquelle des deux est représentée par une statuette acéphale assise sur un coussin, les deux mains jointes à la manière de son époux74 (Pl. 134). L’inscription dans le bas du dos est une dédicace à la déesse Ninégal dans son temple, mais le nom et la parenté par rapport à Gudéa ont disparu. La position de la femme est intéressante, car au lieu d’être assise sur ses talons, elle a les jambes repliées du côté droit et malheureusement les pieds ont été cassés à l’aplomb du bord de la robe qui se terminait par une rangée de petits pompons. L’attitude est maladroitement rendue, alors que la même position est bien traduite chez une femme nue en bronze de Tell Asmar au début du IIe millénaire (ci-dessous, p. 255) ; la direction des jambes est seulement indiquée par une frange striée en biais, gravée ici horizontalement, alors qu’elle devait tomber verticalement au milieu de la jupe. Une autre statuette acéphale de Tello présente une femme assise, mais sur ses talons75. Il est regrettable qu’elle ne soit pas inscrite, car il s’agit d’une dame au vêtement particulièrement riche avec ses pans festonnés qui retombent parallèlement sur la poitrine et deux bracelets en anneaux à chaque poignet. Généralement les pompons ou les glands ornaient les pans du corsage à quelques centimètres du bord, ajustement nouveau que l’on voit mieux sur le buste de « la femme à l’écharpe »76, dont l’inscription devait se trouver sur le bas de la robe et qui est vraiment d’allure royale. La pièce de tissu rectangulaire, mesurant environ 4 m sur 1,30 m, était effrangée de façon différente sur les longs côtés : ici la frange du long côté supérieur est serrée et ondulée, traitée en zigzag comme la chevelure d’Ur-Ningirsu barbu ou la toison du taureau de Gudéa, ce que Léon Heuzey appelait une frange « à boucles tortillées »77. L’étoffe est pliée soigneusement, parallèlement au bord, à une dizaine de centimètres environ, de façon à ce que la frange ne soit pas en lisière, mais forme un motif décoratif qui fasse l’effet d’un large galon orné. Le tissu est d’abord placé horizontalement sur la poitrine, passé sous les bras, puis croisé dans le dos où il forme un large décolleté en V avant de recouvrir les deux épaules et de retomber en deux pans verticaux par devant78. Le long côté inférieur est bordé du motif strié en diagonale comme chez Gudéa et c’est par convention que les plis ont été ici réduits à quatre longs sillons sur le bras, car toute la largeur de l’étoffe est massée pour s’arrêter au coude, en laissant nus les avant-bras. Un buste féminin acéphale de même provenance, mais aux mains intactes, a abouti au British Museum. Il appartenait à une statue nettement plus grande79.
La façon dont les deux pans se terminaient par devant était visible sur le bas d’une statuette, cassée un peu au-dessous de la taille : on y voit encore, au-dessus de deux colonnes d’inscription, deux angles de tissu à bord frangé, arrondis vers l’extérieur80. Il s’agit bien d’une œuvre contemporaine, puisque la dédicace est au nom de Ninkagina, mère de l’ensi Nammaḫni, le rival malheureux d’Ur-Nammu, dont le court règne doit se placer moins de 10 ans après celui de Gudéa81. D’autres exemples proviennent de Tello, en particulier un torse, non représenté dans les publications, dont les deux poignets étaient ornés d’un anneau en cuivre plaqué d’or82 (Pl. 135).
C’est précisément l’époque où les statues commencent à comporter des bijoux, alors que — nous l’avons signalé p. 108 — si les parures ont dû exister de tout temps, elles n’étaient qu’exceptionnellement sculptées. Le collier au ras du cou, fait d’anneaux rigides superposés est caractéristique de la culture néo-sumérienne. La « femme à l’écharpe » en porte cinq rangs83 (Pl. 136 a-b). On.se demande comment ils étaient ajustés avant que ne soit utilisé et généralisé le système du contrepoids (ci-dessous, p. 208, n. 122) qui permettait de le passer par la tête. Sans doute étaient-ils ouverts et faits de métal malléable qui permettait de les resserrer une fois en place. De toutes façons, ils devaient rester largement ouverts par-derrière, mais le chignon couvre toujours le cou à cet endroit. Une tête en diorite, provenant certainement de Tello, mais à la physionomie bien différente de la « femme à l’écharpe » atteste la même mode du collier rigide84. Cependant la cassure du cou permet d’apercevoir un découpage de la pierre en festons, destiné à des incrustations, sans doute de pierres de couleur d’un collier dont on peut se faire une idée d’après un fragment d’encolure de Tello où sont incrustés des morceaux de cornaline, de turquoise et de cuivre doré85. Le milieu du devant était occupé par un médaillon aujourd’hui disparu, entouré de petites pierres, et dans le dos un autre médaillon d’une pierre bleu ardoise est suivi, dans l’échancrure du vêtement croisé, d’une perle en cuivre doré, formant en quelque sorte une amorce de contrepoids. La tête du musée de Berlin montre que le port du collier rigide pouvait être combiné avec celui de perles qui devaient être également de couleur.
Quoi qu’il en soit, et pour revenir à la princesse « à l’écharpe », on ne peut qu’admirer la physionomie altière, avec les sourcils en relief qui se rejoignent en V à la racine du nez, striés en arêtes de poisson, les yeux aux paupières soigneusement liserées, le nez droit, la bouche bien dessinée et le menton carré. Les cheveux finement ondulés de part et d’autre d’une raie centrale encadrent le front et contournent les oreilles, cachés ensuite par un fin tissu qui recouvre le haut de la tête et le gros chignon à double coque, tel qu’il était déjà noué à l’époque d’Akkad, maintenu par un serre-tête rigide sous lequel les extrémités étaient rentrées. Un peu de la chevelure est visible entre le tissu et le serre-tête au sommet de la tête, ce que l’on voit plus nettement encore sur une petite tête de Berlin, qui doit être de même provenance86, où seul le haut du crâne est recouvert d’une calotte, le chignon étant seulement tenu par le serre-tête (Pl. 137). Dans d’autres cas, les cheveux sont seulement visibles sur le front, en ondulations sculptées87 (Fig. 61) ou au moyen d’une incrustation de pâte bleue, faite de poudre de lapis-lazuli88.
61. Tello. Tête féminine. Calcaire.
Cette très petite tête de Tello présente une autre particularité qui renoue avec l’ancienne tradition des yeux et des sourcils incrustés : les orbites creusées portent encore des traces d’enchâssement dans du cuivre89, alors que les sourcils étaient remplis de poudre de lapis-lazuli90. Le port du tissu drapé sur le double chignon tenu par le serre-tête n’était pas forcément une coiffure royale, car il est attesté sur un fragment de stèle appartenant sans doute au règne de Gudéa et résultat probable des fouilles clandestines de 1924 à Tello, sur lequel deux femmes de profil battent des mains91.
Les cheveux pouvaient également tomber librement dans le dos, toujours en arrière des oreilles, et dans ce cas ils n’étaient pas couverts d’un voile, mais le serre-tête restait de rigueur, comme pour la « femme à l’aryballe » que nous avons hypothétiquement attribuée à la fin d’Akkad, pour son absence de collier et ses oreilles couvertes (ci-dessus, p. 171, n. 128). Les seuls exemples de chevelure répandue allant de pair avec un collier rigide sont des têtes. L’une vient de Tello92, l’autre d’Ur93 (Pl. 138) et cette dernière, malgré la mutilation du nez et du bas du visage a gardé l’incrustation des yeux en coquille et lapis-lazuli. Dans les deux cas, les anneaux du collier sont visibles et les cheveux ondulés sont traités en ondes côtelées, mais la tête d’Ur se signale par un bandeau rond plus volumineux qui doit être royal.
Le vêtement de la « femme à l’écharpe » n’est pas le seul que les princesses du temps de Gudéa aient porté, car une statuette acéphale en albâtre qui a souffert du feu est vêtue tout différemment94 (Pl. 139). Les premières lignes de l’inscription gravée sur le bas de la robe ont presque totalement disparu effaçant le nom de la déesse à qui l’objet était voué « pour la vie de Gudéa » ainsi que celui de la dédicante ; pourtant à la 3e ligne, le signe nin est encore visible, donnant de fortes présomptions à l’identification avec l’épouse de l’ensi, Ninalla. La princesse est debout, mains jointes, les pieds nus posés sur un socle rond, solidaire par-derrière de la robe à lisière frangée. La différence essentielle avec le type précédent est l’épaule et une partie du sein droit dénudés. Le tissu frangé traverse le décolleté en biais comme la tunique de Gudéa et un pan court recouvre l’épaule et le bras gauches jusqu’au coude, tombant verticalement sous le bras jusqu’à la hauteur des hanches. Une statuette acéphale analogue et inédite est entrée en 1891 au Louvre par acquisition95. On y observe un angle du tissu frangé tombant sous les mains croisées, comme sur une statuette de Tello, généralement considérée comme masculine, et que, en raison de ce détail et parce qu’elle a les deux épaules couvertes, nous pensons plutôt féminine96 (Pl. 140). Une autre statuette royale portait apparemment le même vêtement que Ninalla, car une bordure striée en biais descend dans le dos à gauche de l’inscription. Malheureusement il n’en reste qu’un fragment dérisoire, permettant cependant de lire qu’il s’agissait d’une fille d’Ur-Bau qui avait voué sa statuette pour la vie de l’ensi Urgar dont elle était sans doute l’épouse97. La frange du bas de la robe est faite des « boucles tortillées » analogues à la garniture de la Dame à l’écharpe.
B. La IIIe Dynastie d’Ur (2112-2004)
Cette dynastie qui connut 66 ans de gloire et d’expansion grâce à ses deux premiers rois, Ur-Nammu et Shulgi, subit ensuite durant plus de 40 ans des revers et des aléas sous les règnes des trois derniers souverains. À la fin, Ibi-Sin dut abandonner très vite son influence sur des territoires harcelés par les tribus envahissantes, dont les Martu sont signalés dès sa 6e année98. Une évolution est visible en art entre la première partie, très proche de l’art de Gudéa, et la seconde qui marque le début d’une ère englobant les dynasties d’Isin, de Larsa et de Babylone99. En dehors des objets datés par une stratigraphie sûre ou une inscription explicite, il est malaisé d’attribuer avec certitude une sculpture à la fin du IIIe millénaire plutôt qu’au début du IIe, à un moment où le brassage de populations fut grand avec les invasions amorites de l’ouest, tandis que se maintenait une forte tradition où se sont fondues les influences akkadiennes et sumériennes. Les critères stylistiques ou iconographiques qui nous ont fait classer des monuments dans ce chapitre plutôt que dans le suivant peuvent être sujets à révision à mesure que de nouvelles découvertes préciseront des synchronismes. Il faut aussi tenir compte du décalage de modes dans les différentes provinces.
1. Divinités
Aucune statue divine connue ne nous semble dater de la IIIe dynastie d’Ur. Si tel ou tel exemplaire en terre cuite peut avoir été façonné tout à fait à la fin de l’époque (Buste de Copenhague, tête de Tello, ci-dessous, p. 226 s.), certaines détails les rendent beaucoup plus caractéristique de l’époque de Larsa ou de la Ière dynastie babylonienne.
Des statuettes de déesse Lama aux mains levées dans l’intercession100 devaient également exister dès la fin de la dynastie de Lagash, mais comme les quelques exemplaires datés en ronde bosse que nous connaissons appartiennent à l’époque de Larsa, ils seront examinés au chapitre suivant.
2. Souverains
a) Les princes
Malgré ses 18 années de règne, Ur-Nammu, premier « roi de Sumer et d’Akkad », n’a pas réussi à passer à la postérité en ronde-bosse, si ce n’est par des statuettes de fondation en cuivre, du type de porteur de couffin. Depuis Ur-Ningirsu101, seul le buste est sculpté lorsque le bas de la figurine est épointé102, mais un autre type apparaît avec Ur-Nammu et c’est d’une véritable statuette qu’il s’agit à Nippur : l’homme est debout sur un socle ovale, vêtu d’une jupe légèrement évasée qui tombe jusqu’aux pieds103. Comme dans l’autre type, la tête rase et imberbe porte un coussin plat en vannerie sur lequel repose la large corbeille ; le buste et les bras nus sont détaillés avec une grande finesse. De même qu’Ur-Ningirsu de Lagash, Ur-Nammu n’était pas toujours imberbe et rasé, car sur la haute stèle dont les fragments ont été retrouvés à Ur, il porte une longue barbe carrée en deux parties, striée horizontalement jusqu’au menton, puis tombant sur la poitrine en mèches striées en arêtes de poisson104. Sur des cheveux courts, il porte la calotte bordée d’un épais serre-tête, inspirée de la coiffure de Gudéa, mais en matière unie où l’on pourrait reconnaître une sorte de feutre, encore utilisé couramment de nos jours en Iraq et en Iran. Sur la tunique à frange qui dégage l’épaule droite, on remarque pour la première fois au bord du décolleté un double bourrelet qui était absent chez Gudéa et chez UrNingirsu105, de même qu’un collier rond probablement en perles, bien différent des anneaux de métal que l’on voit aux cous du dieu et de la déesse. Il porte aussi un mince bracelet au bras droit. Telles sont les nouvelles caractéristiques du costume masculin de la fin du IIIe millénaire, à partir du début de la IIIe dynastie d’Ur.
Avec ses 48 années de règne, Shulgi, fils d’Ur-Nammu recouvre la première moitié du XXIe siècle (2094-2047). Plusieurs statues à son nom ont été trouvées à Ur et à Tello, toutes décapitées et fragmentaires, taillées en diorite ou en stéatite vert foncé. La moins incomplète, trouvée in situ dans le temple de Nanna à Ur, représentait le roi debout, probablement mains jointes, bien que le côté droit du buste ait été arraché106. Le principe de la tunique unie, dégageant l’épaule droite, et dont un pan rentre dans le décolleté en formant des plis devant le bras droit, est toujours le même ; toutefois les deux franges striées en biais sont plus importantes, elles tombent parallèlement et symétriquement devant, sous chaque bras, ce que l’on observe également sur un petit torse d’Ur inscrit au nom du roi où, comme Ur-Ningirsu, il tient sur sa poitrine un animal de sacrifice107. De la figure la plus originale, trouvée à Tello, il ne reste malheureusement que le bas du corps108 et quelques signes, mais c’est suffisant pour identifier le roi debout, dans l’attitude de la marche, la jambe gauche nue légèrement avancée écartant les bords arrondis du vêtement (Pl. 141). Au-dessus du genou est visible le bas d’un pagne bordé d’une double lisière, sorte de sous-vêtement qui n’était jamais visible jusque-là et qui montre que le vêtement à frange oblique est en réalité un manteau d’apparat. Sous le socle bas est taillé un tenon perforé destiné à un support, suivant un usage pratiqué dès le Dynastique Archaïque. Nous avons tenté de l’expliquer comme une statue de procession, d’après une tablette contemporaine signalant le transport de la statue dite « Shulgi allait »109. Une attitude semblable s’observe sur le bas d’une statue de Suse, de grande taille, où le vêtement de dessus est fait de fourrure stylisée en fines languettes superposées110 entre les bords arrondis desquels s’aperçoit la jambe gauche nue. D’autre part un bas de statue en diorite de Suse111, usurpé par Untash-Napirisha au XIIIe siècle, comme l’a bien montré Eva Strommenger112, avec ses deux franges latérales illustre tout à fait le même vêtement et peut bien avoir été la statue d’un roi d’Ur. Ces analogies n’ont rien d’étonnant puisque les rois de la IIIe dynastie colonisèrent Suse et lui valurent une ère de grande prospérité, matérialisée par la construction des temples de Ninhursag de Suse et d’Inshushinak sur l’Acropole sous le règne de Shulgi. C’est ainsi que 8 dépôts de fondation contenant chacun une statuette-clou en cuivre de porteur de couffin et une tablette inscrite furent trouvés sous chacun des temples par Jacques de Morgan en 1904113. Le personnage est identique à ceux qui ont été trouvés en Mésopotamie, inscrits aux noms d’Ur-Nammu et de Shulgi et ils doivent de ce fait avoir été importés. Il est évident qu’il ne peut être question de portraits royaux, mais de la personnification de l’idéal religieux du roi dont le modèle était stéréotypé. Shulgi pouvait, comme son prédécesseur, avoir porté une longue barbe carrée. Il faut avouer que nous jouons de malchance avec les rois de la dynastie, puisqu’aucune tête ne nous en a été conservée.
Nulle statue des trois successeurs de Shulgi n’est connue et pourtant il y en avait de fort belles, mentionnées dans les inscriptions114. Tout au plus peut-on se faire une idée de leur apparence par les cylindres au nom des rois, où le personnage principal est barbu, coiffé du bonnet à serre-tête et vêtu du manteau frangé115. Il s’agit alors de présentation au roi, déifié de son vivant à partir de Shulgi.
Une belle tête de Warka, à la coiffure serre-tête, est celle d’un prince d’Uruk qui peut tout aussi bien avoir été Utuḫegal, vainqueur du dernier roi Guti, que Sinkâshid ou l’un de ses successeurs au début du IIe millénaire116. Le fait qu’il soit rasé et imberbe et que ses yeux aient été creusés pour une incrustation milite plutôt en faveur de la fin du IIIe millénaire.
Une œuvre provinciale est une statuette acquise par le musée de Bruxelles comme provenant d’Umma117. L’homme est debout, mains l’une dans l’autre, vêtu du manteau uni qui dégage l’épaule droite, bordé d’un galon au décolleté. Les yeux sont évidés pour l’incrustation, la coiffure cloche est traitée en zigzag comme sur le buste d’Ur-Ningirsu, mais avec moins de soin ; une longue barbe ovale est traitée en arêtes de poisson. Sans doute peut-on également attribuer à cette époque des monuments de Suse, dont une statue acéphale et sans pieds qui doit être inachevée118. Une barbe ovale couvre le décolleté en biais du manteau dégageant le bras droit. Les mains, jointes à la manière habituelle, avec les pouces à peine dégrossis, ne sont pas détaillées. Un torse de même pierre montre une barbe analogue et trois plis coudés devant l’aisselle droite119.
Un torse royal en diorite, trouvé à Nippur, offrait entre les omoplates une inscription dont il ne reste que les deux dernières lignes120. L’homme portait une longue barbe carrée, stylisée en petits rectangles sous des rangées de bouclettes, et si longue que le bas est caché derrière les mains, jointes à la façon de Gudéa. Le vêtement est le manteau-toge passant sous le bras droit ; le tissu replié au décolleté forme un revers bordé de petits glands très courts, visibles encore sous l’aisselle, avant de rentrer comme de coutume sur le devant droit. Un collier forme un large arrondi qui passe sous la barbe, fait d’une double série de fils ondulés sur lesquels sont enfilées trois perles, une oblongue entre deux rondes, visibles à droite de la barbe. Un bracelet de perles rondes du même calibre orne le poignet droit. Cette parure est nouvelle et dénote l’extrême fin de la dynastie d’Ur, ce qui est confirmé par l’inscription121. Ce critère est important car il montre que dès la fin d’Ur III et probablement déjà sous les règnes des trois derniers rois il y eut de nouvelles modes et surtout dans la parure, comme nous l’avions déjà signalé pour le collier à contrepoids qui fait son apparition à la même époque et ne se généralise qu’au IIe millénaire sous la Ière dynastie de Babylone122. Un torse inédit de Suse, déporté sans doute de Babylonie, rappelle étrangement celui de Nippur avec sa grande barbe rectangulaire, son collier de perles fixées à une série de fils ondulés, son manteau-toge et ses mains jointes123 (Fig. 62).
62. Suse. Torse masculin. Calcaire.
Les bracelets aux poignets sont maintenant de rigueur et une confirmation chronologique est fournie par la statue acéphale du grand prêtre de Nanshe, Ur-Ningirsu, contemporain de quatre des rois d’Ur : Shulgi, Amar-Sin, Shu-Sin, Ibi-Sin124. Il resta donc en fonction durant 20 ans au moins, laps de temps qui sépare la dernière année de Shulgi de la première année d’Ibi-Sin (env. 2047-2028 av. J.-C.), et la statue, vouée pour la vie d’lbi-Sin, doit le représenter à la fin de sa vie. Le canon est très court, comme chez Ur-Bau et l’attitude des mains est classique. Le manteau toge jusqu’à terre laisse les pieds libres et s’ouvre sur un vêtement de dessous par un arrondi souligné par de fines franges en biais comme chez Gudéa. Le collier de dix grosses perles est retenu par « un faisceau de fils ondulés »125, comme dans les cas précédents. Le poignet droit nu est orné d’un bracelet d’un seul rang qui peut avoir existé aussi à gauche sous les plis du vêtement. L’homme était imberbe, mais ses cheveux longs ondulés tombaient jusqu’à la taille dans le dos en une large nappe rectangulaire qui est insolite et répond peut-être à sa fonction.
L’ordre des gouverneurs de Mari, les shakkanakku, qui régnèrent entre UrNammu d’Ur et Hammurabi de Babylone, est encore hypothétique et les avis des philologues autant que des archéologues sont partagés126. Parmi les statues inscrites connues, seule celle d’lshtup-ilum nous semble contemporaine d’Ur III127 (Pl. 142). Sa courte inscription sur le haut du bras droit nu ne donne que son nom et son titre de shakkanakku de Mari. Retrouvée dans la salle du trône du palais, au pied de l’escalier de 11 marches montant à une tribune128, à côté de petits socles de statues, son emplacement initial n’a pu être déterminé. Fils d’Ishme-Dagan, également shakkanakku de Mari, il est connu pour avoir posé les fondations et construit le temple du dieu Dagan, le « Roi du pays », comme le désignent les trois dépôts de fondation trouvés à son nom129. Or une tablette de Mari de la IIIe dynastie d’Ur énumère le salaire en farine d’un homme qui a travaillé pour les temples de Dagan, de Ninégal et de Ninḫursag130, ce qui situe le personnage dans le temps. L’impression de brutalité, renforcée par le martèlement du nez, est due à la pierre basaltique noire, au canon court, à la tête massive, à l’absence de toute fantaisie dans l’exécution de ce corps trapu, aux pieds carrés adossés au montant qui ne fait qu’un par-derrière avec le vêtement. Les mains énormes sont maladroitement croisées. La pièce de tissu rectangulaire, bordée d’une frange libre tombant verticalement ou en oblique suivant la direction de l’étoffe, est drapée autrement qu’en Sumer : au lieu de couvrir l’épaule gauche au départ et de traverser la poitrine en biais, le tissu est posé horizontalement devant, juste sous les pectoraux dont le mamelon droit saille, dégageant ainsi beaucoup plus largement la poitrine131. Cette mode, née en Syrie, continuera à prévaloir à Mari, comme le montre la statue de Puzur-Ishtar (ci-dessous, p. 240) et restera pendant longtemps une caractéristique du costume syrien. Aucun pli n’est indiqué, mais seulement des décrochements dans la masse sous le bras droit et à la hauteur du fessier, ce qui donne une curieuse silhouette. La musculature du bras droit est forcée ; de profil, le cou est aussi large que la tête, coiffée du bonnet uni à serretête enfoncé jusqu’aux oreilles qu’il dégage et couvrant le départ de la barbe ; celle-ci est rectangulaire, bouclée à plat sur trois rangs et ondulée, à l’exception de la moustache aux stries verticales132. Le peu d’espace laissé aux joues comporte cependant un sillon partant des ailes du nez ; les sourcils sont en arêtes de poisson.
b) Les princesses
Deux documents sont datés, grâce à leur dédicace pour la vie de Shulgi : un bas de statuette et une perruque, toutes deux en diorite.
La statuette, trouvée à Tello, était celle de Hala-Lama, fille d’un ensi de Lagash, Lukazal, comme l’indique l’inscription fragmentaire qui couvrait le devant de la robe133. Un pan arrondi, bordé d’une frange de glands, l’encadrait à droite, descendant presque jusqu’au bas de la robe. Ce pauvre vestige est cependant important, car il montre que dès ce temps-là les franges à glands, si prisées des rois d’Akkad, ont été remises à la mode par les grandes dames et probablement pendant longtemps encore134. Eva Strommenger n’a pas manqué de faire le rapprochement avec une petite figure acéphale en ivoire de Suse135 (Pl. 143) dont le drapé permet d’imaginer le haut de la statuette. C’est un vêtement de dessus et l’exemple de Suse montre une manche au-dessus du coude en tissu « cloqué » appartenant à une sorte de sous-vêtements136. Les poignets sont ornés de bracelets rigides à cinq rangs et le cou est cerclé devant de sept rangs superposés, reliés de chaque côté à deux rainures convergeant dans le dos pour former la tige du long contrepoids qui était incrusté de matière précieuse137. De même que chez Gudéa, l’étoffe passait d’abord sous le bras droit, donnant un mouvement oblique au décolleté, mais le pan ouvragé recouvrait l’épaule droite plus ou moins longuement. Le vêtement et la parure sont identiques sur un petit buste de Mari138. La présence du collier à contrepoids, en vogue au début du IIe millénaire, nous incite à penser que l’ivoire de Suse et le buste de Mari sont plus récents. Edith Parada a signalé un collier à contrepoids sur une empreinte datée de Shulgi139 et nous avons noté deux empreintes de Shu-Sin140, mais ce ne sont encore que des exceptions et la grande floraison se situe à partir d’Isin/Larsa, où nous situons plus volontiers ces deux exemples, cités ici pour expliquer et souligner la continuité d’une mode. Nous verrons cependant qu’au début du IIe millénaire, les femmes ont les épaules couvertes par deux pans à glands (ci-dessous, p. 251).
L’autre objet daté du règne de Shulgi par son inscription est une perruque votive141, commandée par un fonctionnaire du grand prêtre Ur-Ningirsu, celui qui voua vingt ans plus tard sa propre statue pour la vie d’Ibi-Sin (ci-dessus, n. 124). Les cheveux ondulés sont repliés en un large chignon en hauteur sur lequel est gravée l’inscription et l’ensemble est tenu par un bandeau plat, coiffure illustrée par une belle tête en diorite d’Ur (Pl. 144), trouvée dans les ruines du temple de Ningal, construit par Ur-Nammu142. Les yeux sont sculptés, les sourcils striés ; les oreilles sont en grande partie couvertes, ce qui est rare après l’époque d’Agadé et pourrait être en faveur de cette dernière période, comme l’a considéré A. Moortgat. Mais un rang de collier encore visible à gauche, le chignon haut comme sur la perruque de Shulgi, le bandeau plat, les cheveux en ondes côtelées de la même manière que sur la tête de marbre blanc d’Ur (Pl. 138), que nous avons datée de l’époque de Gudéa, nous font pencher vers une œuvre néo-sumérienne.
Le métal n’est représenté que par une figurine du niveau E du temple d’Ishtar à Assur, contemporain de la IIIe dynastie d’Ur143 (Fig. 63). La forte oxydation a supprimé des détails de cette femme debout, mains jointes, vêtue de la longue tunique dégageant l’épaule, le bras et peut-être le sein droits. Une lourde chevelure massée sur la nuque semble traitée en petits carrés, « sorte de granulation » dit Walter Andrae, qui s’explique par un filet ou une résille qui fait penser aux petites perruques en stéatite du début du IIe millénaire (ci-dessous, p. 251, n. 132). Comme toute œuvre en métal, la figure est élancée et particulièrement élégante. Un exemple en pierre singulièrement élancé a été trouvé par R. de Mecquenem dans une tombe de Suse144. Le cou et le haut des deux bras sont percés de trous de mortaise pour recevoir la tête et les bras qui étaient ajoutés et ont disparu. Il ne reste que les mains jointes à la ceinture auxquelles devaient se raccorder les avant-bras. La poitrine est sobrement modelée, les hanches sont exceptionnellement fines, couvertes d’une jupe portefeuille fermée devant ; elle s’arrête aux genoux en formant un double feston audessus de deux jambes minces accotées à un montant prolongeant le dos de la statue jusqu’au socle. Sauf pour l’attitude, il n’y a pas de point de comparaison avec cette statue.
63. Assur. Orante. Bronze.
Iran — Bactriane
Il semble que ce soit aux derniers siècles du IIIe millénaire que l’Iran ait produit d’étranges statuettes composites en stéatite et calcaire tendre, connues seulement depuis une dizaine d’années et provenant toujours de fouilles clandestines. Plusieurs statuettes féminines ont ainsi paru sur le marché des antiquités, dont l’origine présumée est la région de Chiraz. L’une d’elles a été acquise par le Louvre145 (Pl. 145), une autre, plus petite, appartient à la collection Foroughi146, une troisième est entrée dans les collections de l’impératrice d’Iran. Leurs caractéristiques communes sont un corps massif en stéatite, une tête schématique et une encolure en calcaire crème, reposant sans tenon dans l’évidement du haut du corps, le haut du crâne coupé pour recevoir un couvre-chef ; il n’y a ni cheveux, ni oreilles, pas d’yeux ni d’arcade sourcilière, seulement un long nez et une fente pour la bouche aux lèvres serrées. Une galette plate en stéatite, dont le sommet représente les cheveux, couvre la tête, amovible comme elle. Les avant-bras en calcaire, qui reposaient sur une plateforme ménagée devant, manquent dans deux cas ; il n’y a pas de pieds, le bas de la robe servant de base. Le vêtement est une combinaison de kaunakès à volants et de châle drapé couvrant les deux épaules. Les détails de la robe, dont l’ampleur rappelle la crinoline Napoléon III, sont très profondément entaillés dans la pierre. Le décolleté de la partie en stéatite était évidé de 2 mm par rapport à la robe, en trapèze devant, en triangle derrière. Comme l’a noté R. Ghirshman, « Ce décolleté devait sans doute recevoir quelque incrustation, observation qui n’est pas sans liaison avec le fait que la tête sculptée ne comporte aucun détail, ni yeux, ni oreilles, ni chevelure, ce qui me fait croire qu’elle a été ainsi conçue pour être revêtue d’un métal qui recouvrait le cou, les épaules et le décolleté »147, ce revêtement étant fait de minces feuilles d’or. Plus récemment encore, et toujours sans contrôle archéologique scientifique, des nécropoles de Bactriane, au sud de l’Amu Daria (Oxus) ont livré des statuettes féminines semblables, mais les femmes sont assises, le corps massif, les épaules extrêmement larges et rondes148 ; la plateforme des genoux ne montre aucune amorce de bras. La seule qui ait perdu sa tête, est aussi la seule qui soit assise sur un tabouret à minces colonnettes149. Elles sont vêtues du kaunakès stylisé en larges languettes striées se chevauchant. Les têtes avec l’amorce du décolleté en calcaire sont les mêmes que dans la série iranienne, mais avec des yeux gravés, ce qui est aussi le cas de petites têtes offertes au Louvre par M. Foroughi150. P. Amiet a indiqué que « toutes ces statuettes paraissent jalonner un itinéraire reliant la Bactriane à la Mésopotamie (où fut incontestablement créée la convention du kaunakès) via l’Élam et le désert de Lut »151. La série de Bactriane rappelle par le vêtement à langues lancéolées et par l’attitude assise l’une des deux femmes sculptées au repoussé sur un vase d’argent découvert fortuitement dans la région de Persépolis et qui porte une inscription en caractères proto-élamites152. Le rapprochement peut également être fait avec les silhouettes féminines assises ou accroupies sur des cylindres du désert du Lut153 et sur un cylindre du roi élamite du XIXe siècle, Ebarat154.
Les statuettes de Bactriane, venant de nécropoles, sont considérées comme funéraires, mais la suggestion de « génies féminins, protecteurs des morts »155 ne peut être ni infirmée ni confirmée dans l’état de nos connaissances.
Le caractère composite caractérise également un ensemble de six statuettes viriles, apparues sur le marché des antiquités vers 1960 et qui doit être sensiblement de la même époque. L’une d’elles a été acquise par le Musée du Louvre156 (Pl. 146), les cinq autres sont entrées dans des collections particulières. Le lot, comme pour les statues féminines, aurait été découvert dans la région de Chiraz157. Après R. Ghirshman, leur étude a été reprise par W. Nagel qui y a ajouté une tête de la collection Hilprecht à l’Université de Iéna et qui les a réunies sous l’épithète géographique « Westmakkanische », les datant de la seconde moitié du IV millénaire158. Mis à part un monstre nu à tête bestiale, campé sur deux pieds fourchus159, les statuettes représentent toutes un homme debout, au corps généralement recouvert d’écailles, aux pectoraux gonflés en accolade, vêtu d’une jupe en autre matière. Le visage, encadré d’un collier de barbe, présente des traits accentués ; les yeux sont évidés pour une incrustation ; une balafre est creusée en diagonale depuis le front jusqu’à la bouche, d’un côté ou de l’autre du nez. Elle est incrustée de pierre blanche sur le buste de la collection Foroughi160 qui comporte une autre balafre sur la joue gauche, entre l’œil et la bouche, mais dépouillée de son incrustation de même que les yeux et les deux trous ronds perforés au-dessus et en dessous de la fente qui représente la bouche. Ce buste est le seul qui ait la peau lisse. Au-dessous d’une ceinture qui forme bourrelet, la pierre est taillée de façon à former un large tenon de fixation pour le bas du corps qui a disparu. Comme les autres exemplaires, celui-ci a la tête enfoncée dans les épaules qui sont larges et charnues. Le bras droit, qui avait été sculpté à part, comme en témoigne une cavité circulaire sous l’épaule, a été arraché ; le bras gauche replié maintient sur la poitrine un récipient en forme de nacelle. Les doigts de la main sont maladroitement rendus. Un couvre-chef, aujourd’hui disparu, était fixé au tenon circulaire taillé dans la pierre au sommet du crâne. La chevelure est incisée en chevrons, tandis que la courte barbe en collier est ciselée de rondelles, comme une partie du châle de la statuette féminine de la collection impériale d’Iran (ci-dessus, n. 146), motifs utilisés sur les vases de stéatite de la fin du IIIe millénaire161. Les oreilles, contrairement à d’autres exemplaires, ne sont pas apparentes. Un buste à la peau écailleuse, aujourd’hui à Berlin162, a également perdu son couvre-chef, dont la place est marquée au sommet du crâne par une sorte de gorge. Ici aussi un trou rond au-dessus et sous la bouche, ainsi que dans les oreilles, était destiné à une incrustation. La balafre, du côté droit du visage, est profonde.
Les trois statuettes complètes sont faites chacune de trois morceaux distincts : le buste et les jambes en stéatite bleu-vert ou en pierre noire s’emboîtent de part et d’autre dans la jupe en calcaire crème, en albâtre ou en alternance de rondelles de pierre rouge et noire superposées, entre lesquelles était incrusté de l’or en minces feuilles. Une seule est coiffée d’un chapeau en calcaire blanc, en forme de poulie163. La statuette du Louvre (Pl. 146) a les cheveux longs tombant dans le dos en ménageant une échancrure entre les omoplates ; ils sont maintenus par un mince fil de fer météorique. L’œil droit a conservé son incrustation de coquille percée d’un trou central pour une autre incrustation qui a disparu. Comme sur les deux bustes, un trou est perforé de part et d’autre des lèvres et celui de la lèvre inférieure a gardé son incrustation blanche. La barbe est gravée de chevrons, comme l’étaient les cheveux du buste Foroughi. Une grande cavité ronde sous le bras gauche pouvait aussi être incrustée. Ursula Seidl a proposé d’y voir un tambour, par comparaison avec le vase aux musiciens de Bismya164. C’est une hypothèse intéressante, toutefois il faut noter que la statuette Foroughi a les poings percés pour tenir de chaque côté une tige ou une baguette et que la baguette de tambour ne semble guère attestée, en tout cas pas sur le vase de Bismya qui remonte à la première moitié du IIIe millénaire165 ; d’autre part le récipient que tient le buste Foroughi160 nous fait penser qu’il s’agit ici de l’orifice d’un vase. La jupe très courte est ornée de fentes verticales partant de la ceinture et aboutissant à mi-hauteur dans un trou circulaire. Ces fentes marquent l’emplacement d’incrustations de feuilles d’or, dont les traces sont encore visibles dans la jupe d’un troisième exemplaire166. Aucun de ces personnages n’a de pieds, qui pouvaient être en autre matière, comme le laisse supposer la légère saillie sous la jambe gauche de la statue Foroughi.
Les trois statuettes et les bustes représentent un homme mûr, aux formes accentuées, envahi de graisse. Les pectoraux en relief et en accolade sont parfois séparés par un sillon médian ; les épaules et les bras sont massifs. Les écailles, qui n’épargnent que le visage et les mains, ont généralement été interprétées comme la manifestation du système pileux. En réalité seule la barbe en collier du buste de Berlin et de la statuette d’une collection particulière est traitée de la même façon que le corps, alors que sur les autres exemplaires, elle est gravée de chevrons. S’agit-il d’un seul ou de plusieurs personnages ? Malgré les variantes, en particulier la chair lisse du buste Foroughi et la place de la balafre, tantôt à gauche et tantôt à droite, nous pensons qu’il s’agit d’un seul et même héros, au système pileux développé, qui dans son âge mûr défendit une population contre des assaillants qui le blessèrent au visage quelque part en Iran. Il devint ainsi l’objet d’une vénération locale, mais son souvenir ne dépassa peut-être pas quelques générations, ce qui expliquerait cependant les variantes dues à des sculpteurs successifs sur un certain laps de temps.
Anatolie — Littoral méditerranéen
Des contrées qui entourent la Mésopotamie au nord et à l’ouest, de la fin du IIIe au IIe millénaire, on sait très peu de choses. Tout semble s’être arrêté en Asie Mineure après la brillante civilisation illustrée à Alaca Hüyük167. Le matériel de Kültépé consistant en idoles d’albâtre plates, en forme de disque surmonté d’une ou plusieurs têtes schématiques, est difficile à dater avec précision168. Dans le même site, des femmes assises, nues le plus souvent, semblent descendre en ligne directe169 des statuettes du VIIe millénaire découvertes à Çatal Hüyük (ci-dessus, p. 8 ss.). Les hanches convergent vers les genoux en une attitude particulière170, les mains couvrent ou soutiennent les seins. Les visages, lorsqu’ils sont préservés, ne présentent que le nez et les yeux, complètement ronds avec un point ou un petit cercle pour la pupille, ce qui est aussi le cas pour les idoles plates. Une tête en marbre, plus évoluée et sculptée en ronde bosse, bien qu’elle ait dû faire partie d’une de ces idoles, montre les yeux faits de trois cercles concentriques et un long nez droit surmontant deux légers bourrelets pour la bouche171. Les cheveux entièrement nattés descendent derrière de grandes oreilles et tombent dans le dos en trois tresses comme sur certaines idoles172 ; trois anneaux enserrent étroitement une bande quadrillée qui occupe toute la hauteur du long cou et que l’on observe également sur une figurine acéphale de Kültépé173, assise sur un tabouret muni de barreaux verticaux par-derrière. Les cheveux longs tombent en natte jusqu’à la taille dans le dos et les mains couvrent les seins. Le geste et l’ampleur des hanches de ces statuettes de Kültépé annoncent la figurine d’ivoire du niveau I b (milieu du XVIIIe siècle : ci-dessous, p. 258) et montrent la continuité de tradition qui aboutit à l’époque de prospérité du kârum de Kanish.
Sur la côte méditerranéenne, Ras Shamra, Byblos, portent l’évidence de destruction par le feu à la fin du IIIe millénaire, probablement du fait des Amorites174, tandis que plus à l’est, à Tell Mardikh/Ebla, la destruction due à Naram-Sin semble si radicale qu’il fallut des siècles pour que la ville se relève de ses ruines175. Les côtes de Syrie et de Palestine sont sous l’influence directe de l’Égypte depuis l’Ancien Empire176, mais une rupture apparaît entre la fin de la VIe et la XIIe dynastie, correspondant à la première période intermédiaire égyptienne (2423-2065 av. J.-C.). Cette rupture, d’après M. Dunand, est due aux invasions amorites, responsables de l’incendie de Byblos177. Kathleen Kenyan a souligné la difficulté d’interpréter la période qui suivit178 et il est probable que les figurines des dépôts d’offrandes de Byblos s’étagent sur un certain laps de temps. Celles de la « jarre Montet »179, un Harpocrate en bronze et deux singes en pierre, sont typiquement égyptiennes de la VIe dynastie180. L’influence égyptienne est donc indéniable sur des objets qui peuvent avoir été façonnés sur place. Une tablette cunéiforme de Drehem atteste pourtant des échanges entre la Mésopotamie et la côte méditerranéenne sous le règne d’Amar-Sin d’Ur : parmi une liste de souverains figure un ensi de Byblos, du nom d’lbdâdi181. Il faut attendre quelques siècles pour que se développe l’intense activité des métallurgistes en Syrie du Nord et sur le littoral. Ils vont alors jeter sur le marché une grande quantité de statuettes étudiées dans les chapitres suivants.
Animaux
Bien qu’ils soient hybrides, les animaux les plus caractéristiques de la dynastie de Lagash sont les bisons couchés à tête humaine, coiffés de la tiare à quatre rangs de cornes. Tous ont la tête tournée sur le côté, deux mèches bouclées encadrant le visage, une longue barbe rectangulaire, faite de mèches soigneusement ondulées, et des oreilles bovines. Un seul exemple avait les yeux creusés pour une incrustation en coquille, dont il restait encore le côté gauche lors de l’acquisition par le Louvre en 1899182. De même un fragment de coquille remplissait encore une des nombreuses cavités tréflées qui couvraient le corps de l’animal, renouant avec la tradition des animaux protohistoriques (ci-dessus, p. 41s., n. 65, 69, 70). Trois autres exemplaires du Louvre ne comportent pas d’incrustations ; l’arête dorsale et le haut des pattes repliées sont couverts par une crinière bouclée, stylisée, nous l’avons signalé, comme la coiffure d’Ur-Ningirsu (ci-dessus, p. 196). La présence de cette crinière permet d’identifier l’animal avec un bison plutôt qu’avec un taureau, comme il est traditionnellement désigné. Un seul de ces bisons a été trouvé à Tello, dédié par un scribe de l’ensi Urgar à une déesse Lama-[]183, tout à fait semblable à un exemplaire anépigraphe du Louvre184 (Pl. 147). Un avant-train dédié à Hendursag par Gudéa, qui a certainement été détourné du chantier de Tello, a été acquis par le Louvre en 1951185 ; la tête est légèrement penchée au lieu d’être hiératiquement dressée et une perforation latérale traverse la toison de part en part, comme pour y passer un lien de suspension. De même que les autres modèles, il avait une cupule au milieu du dos qui fait de ces objets un support de vase analogue au chien de Sumu-ilum (ci-dessous, p. 286, n. 280). Un exemple acéphale analogue, mais en grès rouge, provient d’Ur186 et un exemplaire au nom d’Ur-Ningirsu a été découvert à Larsa en 1976187. Le rôle de ces animaux mythologiques, fréquents en glyptique à l’époque d’Akkad et principalement à Suse188, semble celui d’un bon génie, acolyte d’une autre divinité, bien que les quatre rangs de cornes signalent sa place éminente dans la hiérarchie. Deux bisons androcéphales, couchés tête-bêche, sont le support du dieu Shamash sortant au matin de la montagne189 qu’ils personnifient ainsi en quelque sorte, montrant leur caractère d’auxiliaires d’un dieu. Plus tard, des cylindres typiques de la 1ère dynastie babylonienne montrent le dieu à la scie soit assis, soit debout, le pied droit sur le dos d’un bison androcéphale couché, la tête tournée face à la scène190.
Les taureaux couchés qui surmontent des clous de fondation de Gudéa et de Shulgi sont rendus avec réalisme et puissance. Le port de la tête est complètement tourné chez celui de Gudéa191, alors que celui de Shulgi est de trois-quart, légèrement levé192.
Le lion n’est pas absent du règne de Gudéa et Tello a livré des fragments de pierre, dont un dos avec la queue relevée le long de l’échine193. Une grande tête de lionne en même matière représente l’animal au repos, mais vigilant, le mufle fermé avec les babines en palmettes ; ce qui reste de crinière est traité en bandes rectangulaires séparées par de forts sillons194. L’anatomie est particulièrement bien observée. Léon Heuzey, et après lui André Parrot pensaient qu’il s’agissait d’une tête appliquée sur un relief, comme c’est le cas pour un bassin de Gudéa orné de lions sculptés en relief sur les longs côtés, avec la tête détachée en ronde bosse195. La tête AO 71 a le mufle plus long et projeté d’une façon trop proéminente, semble-t-il, pour appartenir à un relief, aussi penchons-nous pour une tête de statue.
Le grand lion, découvert en 1853 par Taylor à Abu-Shahrein/Eridu196 et redécouvert en 1947 par les fouilles irakiennes197, est taillé dans un bloc de basalte gris, haut de 1m,65, qui a commandé l’attitude assise du fauve, ramassé sur son train arrière, tandis que les pattes antérieures suivent la ligne verticale de la pierre (Pl. 148). Les hanches sont indiquées en léger relief, ainsi que la queue dont l’extrémité enroulée remonte sur le côté droit. La crinière, stylisée en une succession de spirales, se détache par devant pour former une sorte de plastron. L’animal a la gueule ouverte sur quatre crocs triangulaires et la moustache est sculptée en longs bourrelets sinueux. Les yeux sont profondément évidés et les oreilles arrondies peu détachées. Une étoile à peine visible est tracée sur la joue droite198. Des fragments d’un autre lion en même matière ont été signalés sur un tell voisin d’Abu-Shahrein et Fuad Safar a pensé légitimement que l’entrée d’un temple de la IIIe dynastie d’Ur était flanquée de ces lions, pratique que généraliseront les dynasties suivantes (ci-dessous, p. 288 ss.). Déjà Gudéa avait installé un lion, « terreur des dieux », à la porte kasurra de Girsu (Tello)199. La date du lion a été contestée par W. Nagel qui remonte le monument à l’époque « Frühsumerische »200, tout en citant un hymne au temple d’Enki à Eridu datant de la IIIe dynastie d’Ur où « la porte est un lion », rapprochement qui avait été fait par A. Falkenstein201. Deux arguments rendent une aussi haute époque improbable : d’abord l’énormité du bloc de pierre dont l’équivalent n’a pas été trouvé ; même celui de la stèle de la chasse de Warka, le plus grand qui soit attesté, est plus petit de moitié202 et ce n’est pas un hasard si les sculptures jusqu’à Agadé sont de petit format, à cause de la rareté de la pierre, surtout en Sumer. D’autre part, probablement par incapacité technique, les fauves en ronde bosse ont la gueule fermée jusqu’à l’époque d’Akkad. Les fondeurs eux-mêmes, qui n’avaient pourtant pas les mêmes difficultés, ont eu recours à des stratagèmes comme les dents en coquille plaquées et la langue pendante au Dynastique Archaïque III (ci-dessus, p. 138).
Le répertoire animalier de Tello comporte aussi une paire de petits bouquetins, les pattes antérieures pliées reposant sur des lignes ondulées figurant l’eau203 (Pl. 149).
Seul l’avant-train est sculpté et l’un d’eux a disparu. La toison laineuse est traitée en mèches parallèles et la barbiche est faite de deux mèches qui se rejoignent sous le menton. À la hauteur des flots et suivant une ligne horizontale trois perforations traversent l’objet d’avant en arrière pour le fixer, ce qui explique que le dos n’est pas sculpté, car il s’agit en réalité d’un élément décoratif. Lors de la publication, Henri de Genouillac a rappelé qu’une année de Shu-Sin portait la mention d’une construction de la barque « antilope de l’abîme » (abzu). Enki, le dieu des eaux, avait le bouquetin pour symbole et comme roi de l’Abzu, il avait un bateau appelé du nom de l’animal204, mais il ne s’agit pas ici de bateau et il y a deux bouquetins. N’évoqueraient-ils pas plutôt le Tigre et l’Euphrate tels qu’ils sont cités sur le cylindre B de Gudéa à propos d’un récipient utilisé lors des noces de Ningirsu et Bau : « À côté, son vase zida est le Tigre et l’Euphrate qui apportent l’abondance »205. Le motif des deux capridés sortant de l’eau a pu orner ce vase dont on ne sait rien par ailleurs. D’autres mentions conjointes du Tigre et de l’Euphrate figurent de même dans les hymnes sumériens206.
Les représentations de serpents foisonnent depuis la plus haute époque dans l’iconographie du Proche-Orient, mais en glyptique et en relief plus qu’en ronde bosse. À côté du couvercle aux deux serpents entrelacés207 ou du « caducée » aboutissant au bec verseur du gobelet de Gudéa208, Tello a livré la partie antérieure d’un serpent dont les yeux et les mouchetures sont indiqués par des trous de bouterolle qui peuvent avoir été destinés à des incrustations209. La légère ondulation du corps, plat par dessous, indique le mouvement du reptile dont le réalisme était renforcé par une langue en cuivre.
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1 Gadd, « The Dynasty of Agade and the Gutian invasion », CAH I, ch. XIX (fs. 17), 1966, p. 42 ss.
2 Gadd, « Babylonia c. 2120-1800 B.C. », CAH I, ch. XXII (fs. 28), 1965, p. 3.
3 Sollberger, « Sur la chronologie des rois d’Ur », AJO 17, 1954-1956, p. 32 ss.
4 Cf. Spycket, Les statues de culte, pp. 53-58.
5 Sarzec-Heuzey, Déc. en Chaldée, p. 242 ; pl. VIII bis, 1 = Parrot, Tello, p. 144. Cuivre. Ht. 28 cm. Louvre, AO 311.
6 Sarzec-Heuzey, loc.cit., pl. XXVIII, 3-4 ; p. 243 = Parrot, Tello, fig. 44, b ; p. 202 = Frankfort, The Art, pl. 51 A. Cuivre. Ht. 20/21 cm. Louvre, no divers. Pour d’autres exemplaires, cf. Ellis, Foundation Deposits, 1968, p. 61, n. 105.
7 Cf. l’étude la plus complète et la plus récente de R.S. Ellis, loc.cit., pp. 60-63, 68 ; fig. 14.
9 Le rapprochement s’imposait et n’a pas manqué d’être fait (Contenau, MAO II, p. 761 ; Boehmer, Or. 35, 1966, p. 356 ss ; Ellis, loc. cit., pp. 79-81) avec le fragment de relief de Suse où un dieu au pieu, agenouillé, est suivi d’une déesse Lama levant les mains dans le geste d’intercession, face tous deux à un énorme lion, gueule ouverte (Contenau, MAO II, fig. 539 = Parrot, Sumer, pl. 293 = Moortgat, Die Kunst, pl. 158. Calcaire. Ht. du fragment : 55 cm. Louvre, Sb 6). Un problème de date se pose si le bas-relief est attribué à Puzur-Inshushinak, comme l’assure W. Hinz qui a donné une traduction de l’inscription élamite en reconstituant le nom du souverain dans la cassure de la première ligne (Ir. Ant. 2, 1962, p. 11 ; cf. Boehmer, Or. 35, p. 356, qui reproduit la traduction). Nous savons maintenant par la statue en cuivre de Naram-Sin (ci-dessus, p. 156 s) que le motif de l’enforcement du piquet est déjà attesté à l’époque d’Akkad (Sur ce geste garantissant une possession immobilière en droit élamite, cf. J. Klima, Archiv Orientalni 31, 1963, p. 304), mais par contre la déesse Lama intercédant des deux bras levés n’existe pas, à notre connaissance à l’époque d’Akkad, où, en glyptique, seul un bras levé est l’attitude d’accueil ou de prière (Cf. Boehmer, Die Entwicklung ; les références de R.M. Boehmer dans Or. 35, p. 357 s. ne nous semblent pas convaincantes). Comme la déesse Lama est une création de l’époque néo-sumérienne (Spycket, « La déesse Lama », RA 54, 1960, pp. 73-84), il paraît difficile de maintenir l’attribution du relief de Suse à Puzur-lnshushinak, à moins que le « roi d’Awan » ait été contemporain de la dynastie d’Ur-Bau.
10 Parrot, Tello, fig. 46 b ; p. 223 s. = Orthmann, Propyläen 14, pl. 52 ; p. 176. Calcaire. Ht. 1 m env. Musée de Bagdad, IM 8630.
11 Van Buren, Or. 13, 1944, p. 48. — Parrot, Tello, p. 223 s.
12 Strommenger, ZA 53, pl. V ; pp. 48-50.
13 p. 17, 57 s. ; fig. 15, p. 19.
14 Sollberger, AJO 17, p. 133, n. 124 ; p. 36.
15 Delaporte, Louvre I, pl. 12, 6 ; p. 23 = Parrot, Tello, fig. 43 b. Un autre fragment de statue de Tello portait un costume analogue, comme l’a signalé E. Strommenger : ZA 53, pl. XI b ; p. 50 = Déc. en Chaldée, pl. 21 ter, 2. Calcaire. Ht. 21 cm. Louvre, AO 22.
16 Parrot, Sumer, pl. 284 = Moortgat, Die Kunst, pl. 189. Calcaire. Ht. 70 cm. Musée de Berlin, VA 2796.
17 Parrot, Syria 45, 1968, p. 408 : « La pièce est à notre sens la représentation d’un prince, puisqu’il est imberbe, cela ne fait aucun doute, alors que le dieu aurait de toute nécessité été barbu. Or aucune trace de barbe sur le cou de la statue, ni sur son vêtement ».
18 Delaporte, Louvre I, T. 111, pl. 5, fig. 8 = Parrot, Sumer, pl. 309. Marbre blanchâtre. 4 x 2,5 cm. Louvre, AO 4359.
19 Genouillac, Telloh II, pl. 84, 1 = Parrot, Tello, fig. 38 a ; p. 184. Calcaire. Ht. 46 cm. Louvre, AO 12763.
20 En particulier Léon et Jacques Heuzey, Histoire du costume dans l’Antiquité classique. L’Orient. Paris, 1935, pp. 45-65 ; pl. XXX-XLIII. — E. Strommenger, « Mesopotamische Gewandtypen », dans Acta Praehistorica et Archaeologica, 1971, pp. 46-52.
21 L’explication ingénieuse qu’a donnée E. Strommenger (loc. cit., p. 47, fig. 26) du triangle au bas du pan de gauche ne correspond pas à la réalité.
22 Histoire du costume, pl. XXX et XXXIII.
23 Pour la chronologie de ce chapitre, voir F.R. Kraus, « Zur Chronologie der Könige Ur-Nammu und Šulgi von Un », Or. 20, 1951, pp. 385-398 et E. Sollberger, « Sur la chronologie des rois d’Ur et quelques problèmes connexes », AJO 17, 1954-56, pp. 10-48. Le même auteur dans IRSA, p. 115 indique comme dates pour Ur-Bau : 2155-2142.
24 Sarzec-Heuzey, Déc., pl. 7-8 = Parrot, Tello, pl. X, c = Moortgat, Die Kunst, pl. 164. lnscr. Thureau-Dangin, ISA, pp. 94-97, 12 = Sollberger-Kupper, IRSA, p. 115 s., IIC2a. Diorite. Ht. 68 cm. Louvre, AO 9.
25 Coll. De Clercq, Catalogue, II, pl. XI, no 12 = Parrot, Tello, pl. X a = Amiet, La Revue du Louvre, 1968, p. 4 s., fig. 2. Diorite. Ht. 35 cm. Louvre, AO 22194.
26 Quatre filles d’Ur-Bau sont connues : Enanipada, prêtresse de Nanna à Ur (VET I, no 25), Ninalla, épouse de Gudéa (Scheil, RA 24, 1927, p. 109 s.), Ninḫedu, épouse de Nammaḫni (Thureau-Dangin, ISA, p. 100 ss., c, e) et une quatrième, dont le nom a disparu, qui épousa Urgar (ISA, p. 100 s, 13).
27 Sollberger, AJO 17, pp. 31-34, 45 ss. ; IRSA, p. 116 : 2141-2122 av. J.-C.
28 G. Contenau voit dans la suppression du drapé « un témoignage du génie des artistes sumériens et la sûreté de leur goût » : MAO II, p. 725.
29 Font partie de ce « coup de filet », outre les statues d’Ur-Ningirsu de Paris et de Berlin : la statue de Copenhague, la statue au vase jaillissant, un petit Gudéa assis du Metropolitan Museum, une statue assise du musée de Bagdad, une grande statue debout, la statue du British Museum, la tête de Philadelphie : Parrot, Tello, p. 159 et 165 ss. — Ces statues sont presque toutes complètes ou ont pu être complétées. Elles sont vouées à Ningizzida (petit Gudea assis, statue de Bagdad, Ur-Ningirsu) et à Geshtinanna (Vase jaillissant, Copenhague, Stoclet) dans le temple desquels elles devaient se trouver encore au moment où les bédouins les déterrèrent, alors que les statues en diorite découvertes par E. de Sarzec, sont toutes décapitées. Elles avaient été réunies par le roi araméen Adadnadinaḫe dans son palais au IIe siècle av. J.-C. (Parrot, Tello, p. 155) et ont été retrouvées en deux groupes : d’un côté les statues assises, de l’autre les statues debout (Déc. en Chaldée, p. 44). – Flemming Johansen, dans Statues of Gudea, Ancien/and Modern, Copenhagen, 1978, a considéré les statues de 1924 comme des faux, principalement du fait de la matière différente. Déjà en 1957, André Parrot USS 2, 98) avait exprimé son hésitation devant l’authenticité de la statue Stoclet (n. 30), mais les inscriptions de ces statues qui portent chacune un nom différent nous paraissent un sûr garant de l’ensemble, ce que confirme, dans l’ouvrage de Johansen le chapitre VII, rédigé par Bent Alster, « ln Defence of the Authenticity of a Statue of Gudea » (pp. 49-59) : le sumérologue danois démontre en effet qu’en 1925 aucun spécialiste n’aurait été capable de rédiger les inscriptions de ces statues, pas plus que de celle d’Ur-Ningirsu, dans l’état de connaissance de la langue sumérienne.
30 Scheil, RA 22, 1925, pp. 41-43, pl. 1-2 = Parrot, Tello, p. 165 s. pl. XV, b = Frankfort, The Art, pl. 49. Inscr. Scheil, loc. cit. Albâtre translucide. Ht. 41 cm. Ancienne coll. Stoclet.
31 Déc. en Chaldée, pl. 10 et 13,1 = Contenau, MAO II, fig. 501 = Parrot, Tello, pl. XIII, b ; p. 161 s. = Sumer, pl. 254. Inscr. ISA, pp. 116-119, statue C. Diorite. Ht. 1,40 m. Louvre, AO 5.
32 Parrot, Tello, pl. XIX, c ; p. 170 = Sumer, pl. 257. Calcaire. Ht. 9 cm. AO 2791.
33 Legrain, MJ 18, 1927, p. 244 s. = Parrot, Tello, pl. XIX, c ; p. 170. Diorite (?)
34 Thureau-Dangin, Monuments Piot 27, 1924, pp. 97-101 = Contenau, MAO II, fig. 506, p. 722 Parrot, Tello, pl. XV, c ; p. 166 = Sumer, pl. 263. Stéatite grise. Ht. 83 cm. Glyptothèque Ny Carlsberg, no 2753.
35 Scheil, RA 27, 1930, pp. 161-164 ; pl. 1-II = Parrot, Tello, pl. XV, d ; p. 166 s. = Sumer, pl. 263 A-B. = La Revue du Louvre, 1967, p. 89. Calcite. Ht. 63 cm. Louvre, AO 22126.
36 Il faut remarquer cette direction de l’animal qui remonte vers le vase, c’est-à-dire vers la source vivifiante, au lieu de s’en échapper et qui semble la règle jusqu’à l’époque d’Ur III. Cf. pour Akkad : Van Buren, The Flowing Vase, cylindres fig. 6, 13, 19, 20 ; Boehmer, Die Entwicklung, fig. 305, 361, 505, 516, 519. — Pour Gudéa/Ur III : stèle de l’Iraq Museum, Van Buren, loc.cit., fig. 40. Durant la Ière dynastie de Babylone les poissons montent et descendent, avec cependant un majorité montant : Statue au vase jaillissant et peinture de l’investiture de Mari, groupe de deux divinités du Louvre, ci-dessous, p. 231 s. ; par contre, poissons remontant sur le cylindre de Kuk-lNZU de Suse : Amiet, es : no 1769.
37 Un autre fragment de statuette au vase jaillissant, acéphale, provient de Tello : Déc. en Chaldée, pl. 8 bis,5 ; p. 156 = Parrot, Tello, fig. 40, i ; p. 190. Diorite. Ht. 9 cm. Louvre, AO 38. L’homme est barbu et sa barbe ondulée, taillée en carré, se termine par une rangée de bouclettes qui affleurent au bord du vase d’où s’échappent les flots sur la poitrine. Le vêtement à volants dégage l’épaule droite. On ne peut décider s’il s’agit d’un dieu ou d’un homme faisant office de prêtre.
38 Déc. en Chaldée, pl. 12, 1 = Parrot, Tello, pl. XVIII, a ; p. 168 s. = Sumer, pl. 258 = Moortgat, Die Kunst, pl. 166. Diorite. Ht. 23 cm. Louvre, AO 13.
39 Legrain, MJ 18, 1927, pp. 241-245 = Parrot, Tello, pl. XIX, c ; p. 169 s. Diorite. Ht. 10 cm. Pennsylvania Museum, CBS 16664.
40 Langdon, JRAS 1927, pp. 765-768 = Selim Levy, AJO 11, 1936-37, p. 151 s. = Parrot, Tello, pl. XVI, c ; p. 167 s. Cf. Strommenger, BaM 1, p. 82, n. 504. Diorite. Ht. 30 cm. Musée de Bagdad,IM 2909.
41 Amiet, « Les intailles orientales de la coll. H. de Genouillac », Cahiers de Byrsa, VII, 1957, no 63, pl. XII ; p. 53 s. = Boehmer, Die Entwicklung, fig. 724, pl. LXI ; p. 129.
42 Amiet, loc.cit. p. 53 s. L’arbre sur le rocher montagneux est tout à fait dans la tradition akkadienne des empreintes de Tello inscrites aux noms de Naram-Sin et Sharkalisharri par Lugalushumgal : Delaporte, Louvre I, T. 105-107, p. 11 s. ; pl. 9 ; mais les molosses font penser au chien de Tello dédié à Sumu-ilum (ci-dessous, p. 286). Ce cylindre, qui n’a pas d’équivalent, nous semble postérieur à Akkad.
43 Woolley, UE IV, pl. 42 ; p. 51 s. British Museum, 114198. — U. 1658 : Philadelphie, CBS 15609. — U. 18299 : Bagdad, IM 30680. La présence de Gudéa à Ur est signalée par un clou de fondation en terre cuite et par une tablette en stéatite relatant la fondation d’un temple à Nindara : UET I, no 27 et 28 = UE IV, p. 173 : U. 6957 et p. 171 : U. 3244.
44 ILN , 18.8.1956, p. 268, fig. 10. Diorite. Larg. env. 8 cm.
45 Déc. en Chaldée, pl. 21 bis, a-b, p. 330 ; Cros, NFT, pl. I, pp. 21-25, 233 =Parrot, Tello, pl. XV, a ; p. 165 = Sumer, pl. 251 = Moortgat, Die Kunst, pl. 170. Inscr. ISA, pp. 130-133. Diorite. Ht. 45 cm. Louvre, AO 3293. — b) Scheil, RA 27 1930, pl. III, p. 163 s. =Parrot, Tello, pl. XVI, a ; p. 167. Inscr. Scheil, loc. cit. Dolérite. Ht. 44 cm. Metropolitan Museum, 59.2.
46 Déc. en Chaldée, pl. 14-15, 2-4 = Parrot, Tello, pl. XIV, c (et non b) ; p. 163. Inscr. ISA, pp. 124- 127, statue F. Diorite. Ht. 86 cm. Louvre, AO 3.
47 Déc. en Chaldée, pl. 11 et 13, 2 = Parrot, Tello, pl. XIII, c ; p. 162 s. = Sumer, pl. 255 = Moortgat, Die Kunst, pl. 165. Inscr. ISA, pp. 120-125 : statue E. Diorite. Ht. 1,1e m. Louvre, AO 6.
48 Déc. en Chaldée, pl. 16-19 ; pp. 138-140 = Parrot, Tello, pl. XIV b (et non c) ; p. 161 = Sumer, pl. 253. lnscr. ISA, pp. 104-117 : statue B. Diorite. Ht. 93 cm. Louvre, AO 2.
49 Cf. photographies de détail, Parrot, Sumer, pl. 260. Cf. également les mains plus sensibles du Gudéa colossal, AO 1 : Amiet, RA 66, 1972, p. 102, fig. 5.
50 Parrot, Tello, pl. XVII ; p. 171 = Sollberger, « An Inscribed Statuette from the Time of Gudea »,JCS 10, 1956, pp. 11-13, fig. 1. Diorite. Ht. 18,5 cm. Harvard Semitic Museum, HSM 8826.
51 4 Gudéa voués à Ningirsu dans l’Eninnu, 3 à Ningizzida et 3 à Geshtinanna : Spycket, Les statues de culte, p. 54.
52 Tête au bonnet du Louvre, n. 38. — Tête rasée du buste du British Museum : BMQ 6, 1931, pl. XIII = Parrot, Tello, pl. XVI, d ; p. 168 = Frankfort, The Art, pl. 47. Diorite. Ht. du buste : 73 cm. British Museum, 122910. — Tête de Philadelphie, n. 39.
53 Moortgat, Die Kunst, pl. 168-169 ; p. 68 = Meyer, Altor. Denkmäler, pl. 40-41. Calcaire blanc. Ht. 13 cm. Musée de Berlin, VA 2910.
54 Parrot, Syria 34, 1957, pp. 228-231 ; pl. XVI. Diorite. Ht. 15,8 cm. Louvre, AO 20216.
55 Cf. Parrot, Tello, fig. 40, a, 6, c, e, h. Diorite. a) Ht. 6 cm. Louvre, AO 296 ; b) Ht. 10 cm. AO 33 ; c) Ht. 8,5 cm. AO 4350 ; e) Ht. 5,8 cm. AO 4351 ; h) Ht. 4 cm. AO 228.
56 Déc. et Chaldée, pl. XXVIII, 2 = Contenau, MAO II, fig. 537. Cuivre. Ht. env. 24 cm. Louvre, AO 75 ; 258. Ellis, Foundation Deposits, p. 61, en signale un exemplaire à Istanbul et un à Yale.
57 Parrot, Sumer, pl. 159 = Moortgat, Die Kunst, pl. 109.
58 Sollberger, AJO 17, p. 34 s. Dans IRSA, p. 117 : 2121-2118 av. J.-C.
59 Thureau-Dangin, Monuments Piot 27, 1924, pp. 101-108 ; pl. IX-X = Tel, 8, 1935, p. 240-241, A-D (avec moulage de la tête) = Parrot, Tello, pl. XXIII, 6-c ; p. 208 = Moortgat, Die Kunst, pl. 175- 176 (acéphale). Albâtre gypseux. Ht. 46 cm. Louvre, AO 9504.
60 Wilkinson, The Metropolitan Museum of Art, Bulletin, 1949, p. 190.
61 Amiet, La Revue du Louvre, 1974, pp. 243-246. Ht. totale : 55 cm.
62 Cf. Contenau, MAO II, fig. 509-511 ; p. 728. — Genouillac, Telloh II, p. 113 s.
63 Meissner, AJO 5, 1928-29, pl. IV, 2 = Parrot, Tello, pl. XXIII, a ; p. 209 = Moortgat, Die Kunst, pl. 171-174. Diorite. Ht. 17,5 cm. Musée de Berlin, VA 8790.
64 MAO II, pp. 730-32, fig. 513.
65 Cros, NFT, pl. IX, 6 = Parrot, Tello, p. 180. Calcaire. Ht. du fragment : 25 cm. Louvre, AO 4582. Cf. également vase sculpté au tympanon : Parrot, Sumer, pl. 286.
66 Amiet, Agadé, no 41, p. ?9 s ; 130. Albâtre. Ht. 9,5 cm. Louvre, Sb 91. Par contre, il s’agit plutôt d’un bonnet sur un cylindre dédié à Gudéa par le scribe Abba : Parada, Corpus I, no 274, pl. XLIII ; p. 35. Inscr. Oppenheim, id., p. 167 ; le fidèle amené par une déesse à une autre déesse assise porte une barbe en pointe et des cheveux sur la nuque recouverts d’une épaisse coiffe striée qui, de ce fait serait plutôt Gudéa lui-même que le scribe.
67 Meissner, AJO 5, pl. IV, 1 ; p. 5 = Parrot, Tello, fig. 46, c ; p. 208 s. Sans indications de matière ni de dimension. Meissner écrit : « kleine statuette ».
68 Déc. en Chaldée, pl. 6 bis, 3 ; p. 340 = Tel, no 8, p. 242, C = Parrot, Tello, fig. 40, k ; p. 190. Albâtre. Ht. 5,5 cm. Louvre, AO 310.
69 Maurice Lambert qui a examiné l’inscription voit la possibilité du signe A de Gudé(a) et lit : dnin-šubur, dingir-a-ni, nam-til-la, [Gu-de-]a, [en-si, Lagaški], (5 lignes manquent probablement).
70 Déc. en Chaldée, pl. 21 bis, 5 ; p. 340 = Parrot, Tello, fig. 40, f ; p. 190. Calcaire. Ht. 15 cm. Louvre, AO 242.
71 Un fragment de statue en diorite trouvé à Nippur montre une main avec un long pouce tenant les pattes avant d’un chevreau. Il peut être contemporain de Gudéa ou des rois d’Ur, mais le geste est différent de celui des statuettes de Tello : ILN , 18.8.1956, p. 269, fig. 20 : « trouvé sur un sol Ur III du temple d’Inanna ». Diorite. Env. 10 cm. de large.
72 Petit autel à offrande : Scheil, RA 24, 1927, p. 109 s. Schiste noir. Ht. 10,4 cm. Coll. Feuardent.
73 Perle perforée en serpentine verte : Thureau-Dangin, ISA, p. 208 s, n’ = Zadoks-Josephus Jitta, Catalogue sommaire des cylindres orientaux au Cabinet royal des médailles à La Haye, 1952, p. 39, A (trs. trd. R. Frankena).
74 Déc. en Chaldée, pl. 22 bis, 3 a-b ; p. 343 = Contenau, MAO II, fig. 515 = Parrot, Tello, fig. 39, b ; p. 186 = Propyläen 14, pl. 60, b. Inscr. ISA, p. 206 s., k’. Calcaire. Ht. 13 cm. Louvre, AO 226.
75 Cros, NFT, pl. XI,3 a-c ; p. 300 = Unger, RLV 7, 1926, pl. 141, b = Parrot, Tello, fig. 39, c ; p. 186. Albâtre. Ht. 7 cm. Istanbul, no 6425.
76 Déc. en Chaldée, pl. 24 bis,2 ; p. 344 et 158 s. = Parrot, Tello, fig. 41, a ; p. 190 s. = Sumer, pl. 272 = Moortgat, Die Kunst, pl. 184. Stéatite. Ht. 17 cm. Louvre, AO 295.
78 Les essais sur modèle vivant réalisés par Léon Heuzey font bien comprendre le principe de cet ajustement : L. et J. Heuzey, Histoire du costume. L’Orient, 1935, pl. XLII-XLII bis. Cf. aussi Strommenger, Mesop. Gewandtypen, p. 51.
79 Hall, La sculpture babylonienne et assyrienne au British Museum, 1928, pl. VIII, 6 ; p. 34 =Parrot, Tello, fig. 41 c ; p. 191. Diorite. Ht. 17,8 cm. British Museum, 115643.
80 Dessin dans Déc. en Chaldée, p. 346. Inscr. ISA, p. 102 s., f = IRSA, p. 120, II C 7 c. — Un vêtement analogue est porté par une figurine acéphale de Tello en terre cuite (Ht. 10 cm.) : Barrelet, Figurines, no 470, pl. XLV.
81 Cf. Sollberger, AJO 17, 1954-55, p. 31 ; RA 62, 1968, pp. 138-140.
82 Heuzey, Catalogue des antiquités chaldéennes, Paris, 1902, no 108 = Parrot, Tello, p. 191. Calcaire. Ht. 6 cm. Louvre, AO 297. — Autre torse, fruste : Déc. en Chaldée, pl. 22, 3 a-b ; p. 148, 158 = Tello, fig. 39 a ; p. 194. Calcaire. Ht. 24 cm. Louvre, AO 43.
83 Déc. en Chaldée, pl. 24 bis, 2 ; p. 344 = Parrot, Tello, fig. 41 a ; p. 190 s. = Sumer, pl. 272 = Moortgat, Die Kunst, pl. 184 ; p. 70. Stéatite. Ht. 17 cm. Louvre, AO 295.
84 Parrot, Tello, fig. 41, b ; p. 191 = Sumer, pl. 275 = Meyer, Altor. Denkmäler, no 45. Diorite. Ht. 9 cm. Musée de Berlin, VA 2911. — Un fragment de visage avec sourcils en arêtes de poisson et cheveux ondulés sur le front, pouvant appartenir à une tête semblable, provient de Nippur : Mc Cown, Haines, Nippur I (OIP 78), pl. 31, 7. Diorite. Ht. 8 cm. Musée de Bagdad, IM 55958.
85 Déc. en Chaldée, pl. 44 ter, 1 a-b = Parrot, Tello, p. 194 = Spycket, RA 42, 1948, p. 93 s., fig. 9. Albâtre. Ht. 2,5 cm. Louvre, AO 298.